Les 5 covenants incontournables pour sécuriser un financement

François Gladieux
23/5/25
Les 5 covenants incontournables pour sécuriser un financement
Covenant
Entre incertitude macroéconomique et pressions sur les marges, les prêteurs doivent être plus vigilants que jamais en 2025. Les covenants ne sont plus une simple formalité : ce sont de véritables capteurs de risque qui vous alertent avant que la situation de votre emprunteur ne se dégrade significativement. Mais tous les covenants n'offrent pas le même niveau de protection. Voici les cinq plus pertinents pour sécuriser efficacement vos investissements, avec des recommandations concrètes adaptées à chaque secteur d'activité.

1. Le ratio de levier financier (Dette Nette/EBITDA)

Le covenant de référence dans les financements structurés, ce ratio évalue si l'entreprise n'est pas trop endettée par rapport à sa capacité à générer du cash.

Comment le calculer : Dette Financière Nette / EBITDA

Point d'attention : Définissez précisément l'EBITDA dans votre contrat ! Les ajustements (add-backs) doivent être clairement limités pour éviter les présentations trop optimistes.

Quels seuils exiger selon votre secteur ?

SecteurSeuil recommandéCommentaireIndustrieMax 3,0xPlus sensible aux cycles économiquesServices B2BMax 3,5xCash-flows généralement plus stablesDistributionMax 3,0xAttention aux BFR saisonniersImmobilierJusqu'à 4,5xSelon la qualité des actifs sous-jacentsTechnologiesMax 3,0xPeut être plus élevé pour les entreprises en forte croissance

Formulation type pour votre contrat : "L'Emprunteur maintiendra un ratio Dette Financière Nette/EBITDA inférieur à 3,5x à chaque Date de Test, l'EBITDA étant ajusté des éléments exceptionnels dans la limite de 10% de sa valeur."

2. Le ratio de couverture du service de la dette (DSCR)

Vous financez un projet ou un actif immobilier ? Le DSCR constitue un indicateur essentiel. Il vérifie concrètement si l'entreprise génère suffisamment de flux pour rembourser ses échéances.

Comment le calculer : Cash-Flow Available for Debt Service / Service de la dette annuel

Où : CFADS = EBITDA +/- Variation du BFR - Impôts - CAPEX

Quels seuils exiger selon votre type de financement ?

Type de financementSeuil minimumNiveau confortableProjet d'infrastructure1,3x1,5xImmobilier commercial1,2x1,4xCorporate standard1,1x1,3xLBO1,1x à 1,2x1,3x

Exemple concret : Prenons une entreprise avec :

  • EBITDA : 10M€
  • Variation BFR : -1M€ (libération de cash)
  • Impôts : 2M€
  • CAPEX : 3M€
  • Service de la dette : 4M€

CFADS = 10 - 1 - 2 - 3 = 6M€ DSCR = 6M€ / 4M€ = 1,5x

Que se passe-t-il si l'EBITDA chute de 20% ? Le DSCR tombe à 1,1x, juste à la limite du seuil critique. Voilà pourquoi un coussin de sécurité est essentiel !

Formulation type pour votre contrat : "L'Emprunteur maintiendra un Ratio de Couverture du Service de la Dette (DSCR) supérieur ou égal à 1,3x à chaque Date de Test, calculé sur une période glissante de douze (12) mois."

3. Le ratio de couverture des frais financiers (ICR)

L'ICR, particulièrement adapté aux financements in fine ou obligataires, mesure spécifiquement la capacité de l'entreprise à couvrir ses seuls intérêts.

Comment le calculer : EBITDA / Frais financiers nets

Exemple chiffré : Pour une entreprise avec un EBITDA de 5M€ et des frais financiers de 1,25M€, l'ICR est de 4,0x. Si les taux d'intérêt augmentent de 100 points de base et que les frais financiers passent à 1,5M€, l'ICR chute à 3,3x – toujours acceptable mais à surveiller.

Quels seuils privilégier ?

  • Secteurs stables (infrastructures, utilities) : minimum 2,5x
  • Secteurs standard : minimum 3,0x
  • Secteurs cycliques (construction, industrie lourde) : minimum 4,0x

Formulation type pour votre contrat : "L'Emprunteur maintiendra un Ratio de Couverture des Frais Financiers (ICR) supérieur ou égal à 3,5x à chaque Date de Test, calculé sur une période glissante de douze (12) mois."

Une fois la capacité de remboursement sécurisée par ces ratios financiers, il convient d'encadrer l'utilisation des ressources pour éviter que l'emprunteur ne compromette sa situation financière par des décisions opérationnelles inadaptées.

4. Les limitations de CAPEX

Si l'emprunteur envisage des investissements ambitieux, une limitation de CAPEX peut encadrer efficacement leur ampleur tout en préservant sa flexibilité opérationnelle.

Principes clés pour une structuration efficace :

  • Distinguer les CAPEX de maintenance (essentiels) des CAPEX de développement
  • Prévoir un mécanisme de report limité des montants non utilisés
  • Inclure des exceptions pour les opportunités stratégiques, sous validation

Exemple pratique : Pour une entreprise industrielle réalisant 50M€ de chiffre d'affaires, un plafond structuré comme suit serait adapté :

  • CAPEX de maintenance : 2M€/an
  • CAPEX de développement : 3M€/an
  • Report : 20% maximum sur l'exercice suivant

Formulation type pour votre contrat : "Les Dépenses d'Investissement cumulées ne pourront excéder (i) 2M€ par exercice fiscal pour les CAPEX de maintenance et (ii) 3M€ par exercice fiscal pour les CAPEX de développement, avec possibilité de report de 20% maximum du montant non utilisé sur l'exercice suivant. Les Dépenses d'Investissement liées à des acquisitions stratégiques pourront être exclues de ce plafond sous réserve de l'accord préalable de la Majorité des Prêteurs."

5. Les restrictions de distribution de dividendes

Dans les financements à effet de levier, ce covenant joue un rôle déterminant pour garantir que les flux de trésorerie servent prioritairement au désendettement plutôt qu'à la rémunération des actionnaires.

Les trois approches recommandées :

  1. L'interdiction temporaire : Aucun dividende pendant les 2-3 premières années du financement
  2. Le plafonnement proportionnel : Dividendes limités à 50% du résultat net
  3. Les conditions suspensives : Distributions autorisées uniquement si tous les ratios sont respectés avec une marge de sécurité

Cas pratique : Dans un LBO mid-cap, vous pourriez structurer ainsi :

  • Années 1-2 : Aucune distribution
  • Années 3-5 : Distributions limitées à 30% du résultat net, à condition que le ratio de levier post-distribution reste inférieur à 3,0x
  • Au-delà : Distributions limitées à 50% du résultat net si levier Conseil d'expert : Pour les portefeuilles de financements multiples, un outil digital de suivi des covenants permet d'optimiser la surveillance et d'anticiper les risques de bris. Cette approche proactive favorise un dialogue constructif avec l'emprunteur avant que la situation ne se dégrade.

À retenir

Bien choisis et combinés, ces cinq covenants forment un bouclier efficace pour sécuriser vos financements, même en période de turbulence. Ils vous permettent d'intervenir au moment opportun et de préserver la valeur de vos investissements.

La clé d'une sécurisation efficace réside dans l'équilibre entre protection du prêteur et flexibilité opérationnelle pour l'emprunteur. Un covenant trop restrictif peut entraver le développement de l'entreprise, tandis qu'un covenant trop souple n'offre pas la protection nécessaire.

Articles similaires
Vous avez une question ? Notre équipe est à votre disposition
Échangez avec un expert